Divré Torah Parachat Ha’hodesh – 5776
Yéhouda Moshé Charbit
Parachat Ha’hodesh
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בס״ד
Parachat Ha’hodech
Les mois de la Torah
La dernière paracha instituée par nos sages est celle de »Ha’hodech » que nous lirons ce chabbat béézrat Hachem. Il existe une différence entre les mois du calendrier et les mois de la torah. Lorsque nous comptons les mois de l’année, le départ se fait au mois de Tichri. Par contre, la torah place le mois de la sortie d’Égypte, celui de Nissan, en premier du compte, il est le »roch ‘hodachim le début des mois ». C’est donc à cette période que les bné-Israël ont été libérés d’Égypte et qu’ils ont reçu la mitsvah du sacrifice de Pessa’h, qui constitue le premier commandement transmit aux hébreux.
À ce titre, le premier Rachi de la torah écrit : « Rabbi Yitshak a dit : il n’était nécessaire de commencer la torah qu’à partir de »Ha’hodech hazé… » (la paracha dont nous traitons), car il s’agit de la première mitsvah qui a été ordonnée aux bné-Israël. Pour quelle raison alors, la torah a commencé par l’histoire de béréchit ? Car, il est écrit dans téhilim (111, verset 6) : » La puissance de Ses actes, Il l’a transmise à Son peuple, en lui donnant l’héritage des nations ». De sortes, si les nations disent à Israël : »Vous êtes des brigands car vous avez conquis la terre des sept nations (la terre de Canaan) », alors les bné-Israël pourront leur répondre : » Toute la terre appartient à Hakadoch Baroukh Hou, et Il l’a transmise à celui qui semblait droit à Ses yeux, c’était Son intention de leur donner (aux sept nations) et de même c’était Son intention de la leur reprendre afin de nous la donner. »
En clair, l’objectif du récit de béréchit, est de donner un argument aux bné-Israël, qui leur permettra d’exercer leur légitimité sur la terre sainte. La question qui se pose est celle de la pertinence de cet argument. Pour y adhérer il faut d’abord se soumettre à la volonté d’Hachem et surtout accepter Son existence. Dans de telles conditions, la torah qu’Il nous a donné devient une preuve de notre droit à Israël. Cependant, comme nous le savons, la croyance envers Hachem n’est malheureusement pas la qualité des nations qui, au contraire, nient frontalement Son existence. Même ceux qui croient en l’existence de Dieu, n’acceptent pas nécessairement la torah comme étant Sa volonté. Du coup, en quoi le récit de béréchit nous procure t-il un argument ?
La proximité avec Hachem
Le développement que nous allons aborder maintenant constitue non seulement une preuve extraordinaire de l’existence d’Hachem, mais plus encore, nous démontre la proximité particulière avec laquelle nous le côtoyons, une proximité profondément différente de celle dont les autres nations peuvent aspirer.
Comme chacun le sait, le calendrier juif est lunaire, de fait, le mois se base sur la révolution de la lune autours de la terre. Pour des besoins inhérents à ce calendrier, nos sages ont cherché à déterminer le temps de cette révolution, chose qui paraissait impossible pour des problèmes astrophysiques. En effet, il existe une période du mois, durant laquelle la lune est éclairée par le soleil seulement dans sa partie arrière. De fait, la partie qui nous fait face ne peut refléter les rayons du soleil et plonge dans le noir total. Durant ce laps de temps, il devient parfaitement impossible de voir la lune à l’oeil nue. De fait, la mesure de la révolution lunaire se présentait à l’époque, comme un problème particulièrement épineux, et est resté insolvable durant des siècles. Seule l’apparition des satellites modernes a permis de solutionner le problème.
Toutefois, nos sages ne pouvaient se permettre d’attendre le développement technologique et se devaient de déterminer avec précision le temps du cycle lunaire. Cela va conduire un maître du talmud à un enseignement aussi phénoménal que risqué. Il est ainsi enseigné (traité roch hachana, page 25a) : « Rabban Gamliel leur a dit : c’est ainsi que j’ai reçu de la maison du père de mon père ; le renouveau de la lune n’est pas à moins de vingt neuf jours, douze heures et deux tiers d’heure et soixante-treize ‘halakim (ce qui correspond à vingt neuf jours, douze heures, quarante quatre minutes, trois secondes et un tiers de seconde) »
En avançant ce calcul, Rabban Gamliel prend un risque énorme : s’il se trompe has véchalom, toute la torah ne relève plus de la réalité, elle ne serait qu’un tissu de mensonge. De facto, pour aller jusqu’à affirmer une telle idée, c’est nécessairement qu’il savait de quoi il parlait. Ce qui est édifiant, c’est que de nos jours, les scientifiques arrivent au même résultat (à quelque centième près, qui sont dus à ce que nous appelons l’erreur relative, qui caractérise l’imprécision de chaque mesure). En somme, à l’époque du talmud déjà, rabban Gamliel était parvenu à calculer précisément le cycle lunaire, prouvant ainsi qu’il n’inventait rien.
Se référer au créateur et à Sa Torah
Ce qui est passionnant, c’est l’origine de ce résultat, d’où a t-il su ?
Pour parvenir à une connaissance que l’homme ne peut avoir sur la structure du monde, le meilleur moyen dont disposent les bné-Israël est de s’en référer au Créateur qui a tout inscrit dans Sa torah. Dès lors, une simple division peut nous fournir la réponse à un problème d’astrophysique qui a préoccuper les scientifiques des années durant. À savoir, qu’il nous suffit de disposer de deux instants durant lesquels nous savons, avec une précision absolue, que la lune se trouve à une position identique. Dès lors, il nous suffit de connaître l’intervalle qui sépare ces deux temps, et de diviser ce dernier par le nombre de mois entre les deux moments afin d’obtenir le temps de la révolution lunaire. Ce calcul est du niveau d’un enfant de primaire. La seule difficulté est d’obtenir les deux moments en question. Comment être sûr que la lune se trouve parfaitement au même moment ? Il suffit de quelque centimètres voir millimètres pour rendre le calcul faux. Une telle précision n’est pas du domaine de l’homme et seule la torah peut nous la dévoiler.
Ainsi, nos sages partent du moment de la création d’Adam Harichone qui est né un Vendredi (sixième jour de la création). Nos sages dévoilent ainsi qu’Adam a atteint sa phase consciente à la vingtième heure de la journée. À cet instant, il convenait qu’il récite la bénédiction de la lune, il fallait donc que cette dernière soit dans sa période visible. De fait, si précisément à la vingtième heure la lune apparaît, cela signifie que juste avant, elle était dans sa phase obscure. Cette dernière est déterminée, elle dure précisément six heures. Cela signifie que, six heures plus tôt, le Vendredi à la quatorzième heure, la lune se situait à son point initiale, le point zéro de son cycle. Nous disposons donc d’une première lune avec sa géolocalisation parfaite.
Il nous suffit alors d’en trouver une seconde afin de faire notre calcul enfantin. L’endroit que nos sages choisissent pour dévoiler cette seconde lune est encore plus stupéfiant. D’après l’explication profonde de la création, nos maîtres, entre autres Rabbénou Bé’hayé, dévoilent qu’avant l’existante matérielle du monde, a eu lieu une existence spirituelle, qui contenait l’ensemble des éléments de notre monde dans un état métaphysique. Les maîtres de la mystique nous expliquent donc qu’un an avant la création, la lune était déjà en place et précisément ils nous suggèrent la position de la lune, un an avant qu’elle ne soit créée de façon physique. Le secret se trouve dans les premiers versets de la torah, en comptant toutes les quarante deux lettres (ce nombre correspond à un nom divin très important, comme le rapporte le premier Tosfot du second chapitre du traité ‘haguiga). Nous obtenons ainsi les lettres » בהר« ד » qui correspondent respectivement au deuxième jours, à la cinquième heure et à 204 ‘halakim. Ainsi, nous découvrons le point zéro du cycle lunaire un an avant qu’elle n’apparaisse !
Le résultat obtenu par Rabban Gamliel n’est que la simple division par douze entre ces deux temps ! Ce qui est phénoménal, c’est que son calcul se base sur une nécessité évidente, celle de la véracité de la torah et à deux niveaux. Pour aboutir au chiffre exact il faut obligatoirement que le premier moment que nos sages enseignent, celui de la naissance d’Adam et surtout que le second, qui se base sur une conception parfaitement métaphysique du monde, soient vrais ! Si un seul de ces deux instants était une invention, jamais nous n’aurions pu trouver la révolution lunaire avec une telle précision !
Nous voyons donc combien, la torah nous accorde la preuve de son authenticité. Cela nous permet de comprendre l’enseignement apporté par Rachi au nom de Rabbi Yitshak. Le récit de béréchit, est en effet une preuve et un argument nous permettant de légitimer notre possession d’Israël car il renferme une des preuves explicite de l’existence de Dieu ! Si la torah avait commencé plus loin, elle aurait occultée cet important détail !
Cela nous pousse à analyser la relation exclusive du peuple juif avec le Maître du monde. Ce que nous venons de démontrer, repose sur un fonctionnement permanent du monde, une règle continue qui le régit. Il s’agit donc de l’expression naturelle des choses. Toutefois, nous lisons cette semaine parachat ha’hodech, dans laquelle Hachem impose que Nissan soit le premier mois. Une discussion existe dans le talmud, traité Roch Hachana (page 11a) à propos de la date de la création du monde. Ainsi, deux Tanaïm s’opposent. Le premier, Rabbi Éliezer, soutient que le monde a été créé en Tichri. Le second, Rabbi Yéhochoua affirme qu’il a été créé durant le mois de Nissan. Précisons que les deux parlent du sixième jour de la création, date à laquelle Adam a vu le jour et qui constitue donc le point de départ de l’humanité (ainsi selon les deux versions la date de la création du monde en tant que tel, à savoir le premier jour de la création, eut lieu six jours plus tôt). La guémara développe et apporte une preuve aux deux enseignements qui semblent donc aussi justifier l’un que l’autre.
Sur cela le targoum Yonathan Ben Ouziel (chémot, chapitre 12, verset 2) écrit que jusqu’à ce qu’Hachem institue le mois de Nissan comme premier des mois, le premier mois était Tichri, ce n’est qu’avec la naissance d’Israël, que les choses changent rendant Nissan premier des mois. Ceci se justifie par la nature même de ce mois, dont le nom signifie « miracle ». La notion ici évoquée consiste à différencier le mode de fonctionnement du monde. Jusqu’à la sortie d’Égypte, le monde est régit par la nature, il est encadré par des mesures, des règles à suivre. Dans ce type de mécanisme, Tichri est le premier mois. Par contre, la libération du peuple hébreu repose spécifiquement sur la notion du miracle, du surnaturel ! L’existence d’Israël ne se justifie que par l’intervention directe d’Hakadoch Baroukh Hou ! C’est pourquoi la torah dit « הַחֹדֶשׁ הַזֶּה לָכֶם, רֹאשׁ חֳדָשִׁים Ce mois-ci est pour vous le commencement des mois », car c’est « pour vous » que ce mois est le premier, car le peuple en question diffère des lois du monde, il est miraculeux, il s’agit d’une créature à part entière ! C’est pourquoi, à titre personnel, le peuple juif ne compte pas les mois d’après le registre de la création du monde qui se base sur Tichri, mais d’après le moment de son apparition, le moment où Hachem le sort d’Égypte, le mois de Nissan, qui reflète la notion du miracle.
C’est justement là que nous comprenons la dimension du rapport avec Hachem. Face aux nations du monde, la justification de l’existence divine se fait sur la base de la nature, d’une démonstration cartésienne, s’appuyant sur la façon dont le monde naturel fonctionne. Notre approche se veut radicalement différente. Notre savoir de l’existence d’Hachem n’est pas apparu par simple réflexion, il est le résultat d’un constat, Dieu s’est manifesté, Il est intervenu pour nous, Il nous a affranchi du monde terrestre pour nous élever dans un monde divin, le Sien ! Ainsi, l’enseignement de Rachi au nom de Rabbi Yitshak prend une toute autre tournure. Pour nous, le peuple hébreu, il aurait été suffisant de commencer la torah par le passage de Ha’hodech, car il constitue un dévoilement d’Hachem, un constat tangible. C’est seulement pour les goyim que la torah commence par béréchit, car eux nous pas vécu cette dimension de la connaissance d’Hachem. Pour eux, il convient d’apporter une preuve ! D’où béréchit et le sous-entendu qu’il contient, celui d’une démonstration !
Yéhi ratsone que les bné-Israël puisse revivre la manifestation d’Hachem, afin de pouvoir à nouveau le connaître, le ressentir, et vivre en Sa compagnie, amen véamen.
Chabbat chalom.
Mis en ligne le 16 Avril 2016 – Mis à jour le 4 Avril 2019